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Entretien : Akira Kosemura, instigateur du néo-classique au cinéma

Entretien : Akira Kosemura, instigateur du néo-classique au cinéma

Arthur Glasender

Compositeur parmi les plus influents de la musique à l’image, Akira Kosemura signe la bande originale de True Mothers, le dernier film de la réalisatrice japonaise Naomi Kawase. On a échangé avec l’artiste basé à Tokyo pour parler de son approche de la composition et de ses différentes expériences.

Adaptation du roman japonais à succès de Mizuki Tsujimura, True Mothers traite des difficultés d’un jeune couple japonais à concevoir un enfant. Se tournant vers la solution de l’adoption, la situation évolue drastiquement 6 ans plus tard lorsque les protagonistes reçoivent l’appel d’une femme qui prétend être la mère biologique de l’enfant. Afin de construire et produire une bande originale s’intégrant parfaitement à l’univers de ce drame social, Akira Kosemura a collaboré plus d’un an avec la réalisatrice Noemi Kawase. Rien n’a été laissé au détail.

Akira Kosemura, dans son studio de Tokyo, seul face à son piano
Akira Kosemura associe les sons de la nature au néo-classique

Maître dans la composition dite atmosphérique et naturelle, la musique d’Akira Kosemura est minimaliste et précise. Pianiste de formation, l’artiste japonais compose ses premiers morceaux dès l’âge de sept ans. Son premier album It’s On Everything, sorti en 2007, lance la carrière de l’artiste. Akira Kosemura, fondateur du label Schole, a l’expérience des collaborations. Il conçoit en 2012 la musique du ballet Manon chorégraphié par Kimiho Hulbert, collabore avec Devendra Banhart et participe à de nombreuses publicités. En 2015, pour l’exposition universelle qui se tient à Milan, l’artiste compose la musique du pavillon du Japon. En 2018, il compose l’intégralité de la musique de la série US This Is.

Arthur : Hello Akira. Première question, quand as-tu commencé la musique ?

Akira Kosemura : On m’a initié très jeune au piano mais j’ai réellement commencé à composer de la musique au collège. 

A. J’ai lu que tu avais arrêté de jouer pendant une longue période lorsque tu étais plus jeune. Qu’est ce qui t’as fait reprendre ?

AK. En fait, le piano est le seul instrument que je maîtrise. À ce moment là, j’enregistrais des sons ambiants en extérieur, puis je rééditais le morceau en studio en ajoutant du piano ou des synthétiseurs par-dessus. 

A. Quelles ont été les bandes originales et les compositeurs qui t’ont inspirés ?

AK. Je ne saurais pas choisir. Quand j’étais enfant, c’était la musique des grands compositeurs hollywoodiens comme James Horner, John Williams, Alan Silvestri ou Thomas Newman qui m’impressionnait. Lorsque j’étais au lycée, je jouais dans un groupe mais je ne pensais pas encore à devenir compositeur. J’ai vraiment commencé à vouloir le devenir après mon diplôme universitaire en sortant mon tout premier album. Ma vie n’était pas entièrement contrôlée par la musique avant ça, je produisais de la musique car c’était ce que je voulais faire de ma vie.

Ça m’a amené à rencontrer Lawrence English, un artiste et compositeur expérimental reconnu. Il m’a invité à sortir mon premier album sur son label qu’il a fondé Room 40/Someone Good. C’était en 2006 lorsque j’avais 21 ans. Ces dernières années, ce sont les superbes compositions de Jóhann Jóhannsson et Max Richter qui m’impressionnent le plus. En ce moment, j’écoute beaucoup la bande originale de la série Dark (Netflix) composée par Ben  Frost.

Olivier Fade : Comment as-tu rencontré Naomi  Kawase et qu’est ce qui vous a amené à travailler ensemble ?

AK. Un des producteurs du film True Mothers m’a appelé pour que je rencontre Kawase-san dans leurs bureaux. On a discuté pendant une heure ou deux, elle avait déjà écouté mes derniers projets et moi j’étais évidemment déjà très fan de sa filmographie. J’ai été très honoré de faire partie de son nouveau film. 

O. Quelle a été ton approche dans la composition ? As-tu passé le film en boucle pour t’imprégner de l’atmosphère avant de composer la musique ?

AK : Complètement. J’ai commencé à composer avant le tournage car les cinéastes souhaitaient lier intrinsèquement la musique à l’image. J’ai beaucoup composé pendant un an, de l’avant-tournage jusqu’au mix final. Kawase-san m’envoyait des scènes qu’elle était en train d’éditer, on se parlait au téléphone et je faisais évoluer la musique. On a répété ce process encore et encore, le film changeait tous les jours. On se parlait quotidiennement pour que je puisse composer.

OF. Quelle est la différence dans le processus de création comparé aux séries TV sur lesquelles tu as travaillé ? ​

AK. Oui c’est complètement différent. La série américaine sur laquelle j’ai travaillé était plus organisée, les morceaux que je devais composer allaient droit au but. Mara Brock Akil, le directeur de la série m’a fait entièrement confiance sur la musique.

AG. Tu utilises des samples extraits de l’environnement naturel dans ta musique. Comment les trouves-tu ?

AK. Le monde produit de la musique à chaque instant, il faut écouter attentivement. Je capture ces instants quand je sens que quelque chose de spécial se passe.  

O. Est ce que tu reçois de plus en plus de propositions pour des films internationaux ? Quelles sont les prochaines étapes pour toi ?

AK. Oui, j’ai déjà travaillé sur un film anglais. Ça m’a rendu vraiment heureux de réussir à composer une musique qui convienne aux paysages de l’Angleterre et l’Ecosse. J’ai envie d’explorer des possibilités en Europe ou aux États-Unis.

A. Ma dernière question est notre signature chez Arty Magazine. Quelle est ta définition d’un artiste ?

AK. Un artiste est quelqu’un qui est capable de faire face à lui-même, et qui explore ce qui lui tient à cœur. 

Écoutez Akira Kosemura sur Spotify.

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